Bonjour à tous !
Nos deux auteurs qui se sont donnés pleinement dans leurs textes, viennent de m'envoyer leurs créations. Je rappelle le thème : Je ne suis pas qui tu vois.
Avant que vous commenciez à voter, je vous rappelle aussi les restrictions qu'ils se sont imposés :
- insérer les mots : chocolat, musculation et ornithorynque.
Voici sans plus tarder les deux textes !

« A plus tard Maman, passe le bonjour à la famille pour moi, ainsi qu’au petit ornithorynque comme tu le fais toujours ! » dit Farid avant de raccrocher. Cela fait maintenant longtemps qu’il n’est pas retourné dans sa petite ville natale de Msaken, au Nord de la Tunisie. Bientôt quatre ans se sont écoulés depuis que ce père de famille a décidé de poser le pied sur le sol français, et de s’y installer. Il maîtrise bien la langue, tout comme ses filles qui sont remarquables à l’école, ce qui lui a permis de sortir de nombreuses fois de situations inconfortables avec les services de police. Au grand regret de sa femme, son époux a hérité du tempérament colérique de son paternel, ainsi que les gestes qu’il a pu observer dans le comportement de celui-ci. Farid est connu des services locaux pour quelques vols à l’étalage, mais rien de bien plus sévère.
Après avoir repensé aux bons moments qu’il a pu passer avec ses proches, le jeune homme s’assoit sur le canapé du salon, ordinateur sur les genoux, carré de chocolat sur la table, et observe son écran de téléphone avec insistance et nervosité. On peut observer son biceps se contracter, partie de son corps qu’il apprécie –surtout lorsque sa « petite veine » ressort - et qu’il développe particulièrement lors de ses séances de musculation.
Quelques dizaines de minutes plus tard, son Nokia 3310 émet un son que tout le monde a déjà entendu, LA sonnerie fatidique de ce téléphone incassable. Elle tire Farid de ses pensées de la veille, qui fut remplie d’émotion suite à des difficultés de préparation et d’organisation.
« Allo » dit-il après avoir décroché. Au bout du fil, un homme à peine réveillé lui engage la conversation.
« - Allo Farid, c'est moi. Tu vas bien ?
- Salut Marc, et bien écoute, je vais bien même si je suis vraiment claqué, la journée d’hier m’a pris pas mal de ressources et était assez éprouvante … Quoi de neuf de ton côté ? " lui demande-t-il tout en croquant dans son chocolat.
- « J'imagine bien… », lui répond son interlocuteur, « … Mais ne t'en fais pas, c’est comme une recette, tu sais ce qu’on dit ; plus la préparation est longue et compliquée, plus le résultat vaut le coup, crois-moi, je suis déjà passé par là.
- Oui je suis au courant, même si ça ne fait pas longtemps et que je débute ici, j'ai toujours été une personne prêtant attention au moindre détail et faisant en sorte que tout soit bien exécuté comme il faut. Ne t’en fais pas Marc.
- Mhh, d’ailleurs, je t'appelle car le Boss se pose des questions. Il se demande si ton boulot avance, car pour lui la date d'échéance arrive à grand pas, et tu sais comme il est minutieux avec le travail » lui rappelle Marc.
« - Oui, je le sais qu’il est pointilleux, et ne t’inquiètes pas, tu peux le rassurer, tout est fin prêt, et sa livraison aura lieu sans accrocs ni retards ! » s’exclame le nouvel employé.
« - Parfait, tu m’en vois rassuré, car je t’avoue qu’il s’inquiète énormément pour toi et ton avenir. Et s’il te plait, n’oublie pas, car je sais que tu es tête en l’air, donc je te le répète encore une fois : une ville possède de nombreuses routes avec au minimum autant de raccourcis. Si tu vois que tu es en retard, n’hésite pas, le Boss net'en voudra pas si tu abîmes un peu le camion. Tant que la marchandise est livrée à temps, tout ira bien. Il semblerait que ce soit une commande avec un maximum de personnes tu vois, du coup quitte à prendre quelques risques, ça en vaut clairement la chandelle, surtout à l’approche des fêtes. Après, n’abuses pas hein, tu as le droit de l'abîmer un peu comme quelques égratignures ou impacts sur le pare-brise et les portières, mais si tu exploses le camion tu auras les remontrances du chef, il faut qu’il puisse retourner chez l’expéditeur ! Sur ce, je te laisse,souffle un coup et fonce l'ami, salut ! "
Farid n’a pas le temps de répondre que son ami a déjà raccroché. La tension commence à monter dans tout son être, et s’il n’était pas à la hauteur ? Et s’il ne s’exécutait pas correctement ? Il décide alors de descendre dans la rue et de se rendre au bar du coin afin de décompresser autour d’une boisson gazéifiée et de quelques discussions à droite à gauche. La vieille dame du comptoir l’apprécie, ainsi que le petit jeune du quartier voisin,avec qui il joue souvent à la pétanque.
La soirée se termine et Morphée emporte Farid dans de nouveaux horizons très lointains.
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Le lendemain, 14 juillet 2016, un Flash Info de dernière minute sur la chaîne télévisée numéro 1 est diffusé.
« Selon nos informations en temps réel, une attaque terroriste islamiste au camion bélier s’est déroulée il y a quelques minutes sur la promenade des Anglais, à Nice, dans le Sud-Est du pays. Le conducteur du poids lourd aurait roulé sur plus de deux kilomètres, entraînant tout sur son passage et prenant pour cible le plus de civils se présentant sur son chemin, à l’issue du feu d’artifice ayant eu lieu pour célébrer la fête nationale. A l’heure actuelle, nous pouvons comptabiliser 81 victimes, et le conducteur, apparemment identifié au nom de Farid Mounir, vient d’être abattu par la police après avoir tenté d’ouvrir le feu sur les officiers. Cet homme n’était pas connu des services de police, et était décrit comme un homme tout à fait banal par son entourage ainsi que ses voisins. »

Après une soirée forte en émotions, en danse et en alcool, il était temps de rentrer chez soi. Le problème était simple : à cinq heures du matin, il n'y a plus de métro. Ce n'était pas très dérangeant pour Dani, habitué à marcher à longueur de journée, sauf que cette fois-ci il n'était pas dans sa ville de prédilection ; Londres est bien moins rassurante, la nuit, que Paris.
Dani sortit son smartphone pour obtenir l'itinéraire le plus court et le plus rapide.
Il salua ses amis et partit en direction du nord-ouest londonien.
De rues éclairées aux petites ruelles sombres n'ayant que d'anciens candélabres dont la saleté rendait obsolètes, le jeune homme n'était pas des plus rassurés. Son regard se posait sur tout élément potentiellement suspect. Un rat enfoui dans une poubelle qui fuyait à son approche, les yeux brillants d'un chat entre deux voitures, un carton potentiellement habité par un homme, tout était prétexte à presser le pas.
Pour essayer de penser à autre chose, Dani avait vissé les écouteurs de son téléphone dans les oreilles, laissant Bach, Beethoven et autres compositeurs classiques envahirent son esprit.
« À deux-cent mètres, tournez à droite. »
La voix du GPS le fît sursauter.
Étonné, il regarda l'itinéraire exacte, mais ses doutes étaient fondés : il devait traverser Kensington Park pour se rendre à son hôtel. Il n'en avait aucune envie. Il hésita à contourner le parc, mais cela allongerait son trajet de trente à cinquante minutes. Hors, il avait froid, faim, était fatigué et ne souhaitait pas se laisser envahir par une peur inutile.
Dani prit une forte inspiration et s'engouffra dans le parc, où les lampadaires étaient très rares et dont l'odeur de l'herbe humide du matin ne le rassurait guère.
Plus alerte que dans les rues qui lui paraissaient soudain insignifiantes, il avançait d'un pas énergique, la tête faisant gyroscope et le son de sa musique au quasi-minimum pour pouvoir identifier tout mouvement ou bruit suspect.
Deux, trois, quatre minutes... Il n'y avait vraiment aucune raison d'avoir peur. Encore un cliché que la société crée : des méchants se cachent dans les parcs pour tuer les fêtards qui s'y pénètrent tard le soir, ou très tôt le matin.
Cependant, Dani fût pris de panique lorsqu'il s'est trouvé à quelques mètres de l'étang du parc. Habituellement agrémenté de cygnes blancs, de canards et entouré des touristes espérant y voir un ornithorynque, il n'était désormais plus qu'un miroir noir et blanc de la métropole aux visages de monstres aux multiples yeux qu'étaient les gratte-ciels. À cela est venue s'ajouter une brume épaisse.
Le jeune homme avait beau utiliser la lampe de son smartphone pour tenter de voir ce qui se trouvait devant lui, il ne pouvait plus voir au-delà d'un mètre. Devait-il faire demi-tour ? Si quelqu'un le voyait avec sa lampe, était-il apte à courir à travers l'opacité grise sans se perdre ?
Après d'interminable secondes de réflexion, Dani choisit de continuer son chemin. Tant qu'à faire, autant vivre sa vie au risque de la perdre plutôt que d'avoir peur de ce qu'il critique habituellement : la crainte que la société crée pour justifier l'existence d'outils répressifs et préventifs de plus en plus liberticides dans les grandes villes.
La main gauche serrant le smartphone de toutes ses forces, le poing droit fermé à s'enfoncer les ongles dans la paume, et le cœur battant la chamade, Dani avança en tentant de se convaincre que rien n'allait se passer. De toute façon, il ne lui restait plus qu'une petite quinzaine de minutes avant d'être sorti du parc. Que pouvait-il se passer un si court laps de temps ?
« À cinquante mètres, tournez légèrement à gauche puis continuez tout droit. »
Quoi !?! Il n'y a pas de chemin à gauche... Faut-il couper par l'herbe ? Apeuré, Dani choisit de continuer sur le chemin en terre, ne voulant pas s'aventurer dans un endroit encore moins cadré. C'est alors, au bout de deux minutes sur le chemin qu'il pensait plus sûr, qu'il vit une silhouette venir de la droite.
La silhouette, accompagnée d'une plus petite silhouette tenue en laisse, venait droit sur le jeune homme. Ce dernier, accéléra autant qu'il le pouvait, sans pour autant courir, mais l'ombre et son chien fonçaient indéniablement sur lui. Il était fait. Son cœur était prêt rompre sa cage thoracique, ses jambes flagellaient, les sensations de l'alcool disparurent en un instant. Aucune échappatoire. Crier dans un parc désert où la nuit avale tout, courir dans une direction inconnue sur un sol glissant, ou appeler la police, n'auraient été d'aucune aide.
Dani était donc fin prêt à faire face au démon et son cerbère. La lumière du téléphone disparût dans sa poche de jean, les écouteurs tombèrent dans le col en V de son pull cachant d'hypothétiques tablettes de chocolat. Le jeune homme se mit en position de combat pour recevoir les coups de son assaillant à la musculation bien visible.
L'attente du duel fût interminable. Le colosse au chien s'approcha. La brume semblait se dissiper à son arrivée et son visage se dessinait petit-à-petit. Un homme blanc, trentenaire, d'un mètre quatre-vingt-dix, le crâne rasé, une balafre au niveau de l'œil droit faisait désormais face à un homme chétif, d'un mètre soixante-cinq, avec une mèche sur les yeux et un regard terrorisé : Dani.
Le grand homme regardé Dani droit dans la pupille de ses yeux, s'approcha encore un petit peu et s'arrêta. Il sortit quelque chose de la poche de son blouson de jean déchiré : un sac plastique. Dani allait être tué par asphyxie. Une mort atroce qui laisse peut de traces. Incapable de bouger, il s'avoua définitivement vaincu. Le monstre se baissa lentement face au jeune homme jusqu'à toucher le sol avec sa main couverte du sac plastique.
Dani n'en revenait pas... La brute épaisse ne faisait que ramasser la crotte que son gros chien venait de faire devant lui.
Une fois, l'objet du litige retiré du sol, le géant se releva, sourit à Dani, puis il reprit sa route dans une direction opposée.
Probablement blanc comme un linge, le jeune français reprit sa respiration, coupée depuis trop longtemps, et il finit son chemin sans embûche, l'esprit torturé par ce qu'il venait de faire : avoir d'un individu qui ne lui voulait aucun mal, au simple prétexte qu'il avait une tête de méchant de film.
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Pour voter, il vous suffit de copier le code suivant dans votre réponse. Je vous rappelle que pour éditer vos votes, vous devez d'abord m'en informer ou informer les maîtres des lieux : Alena et Eurynos. A vos claviers !
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